Le plan d’Israël pour éliminer les chefs du Hamas cachés à l’étranger

Lors d’une conférence de presse, le 22 novembre dernier, Benyamin Netanyahou a rappelé les objectifs de guerre de son gouvernement : « Éliminer le Hamas, libérer [les] otages et faire en sorte qu’après la disparition du Hamas, Gaza ne constitue plus une menace pour Israël. »

Dans un contexte de fortes pressions internationales et de tensions intérieures attisées par les inquiétudes quant au sort des otages, le Premier ministre israélien a insisté auprès de ses concitoyens sur le fait que la guerre allait continuer jusqu’à ce que ces objectifs soient atteints.

La traque des responsables du 7 octobre

Une guerre conventionnelle menée dans l’enclave palestinienne mais aussi une guerre de l’ombre déployée à l’étranger, comme l’a révélé de façon surprenante Netanyahou. « J’ai donné l’ordre au Mossad [service de renseignement israélien] d’agir contre les chefs du Hamas où qu’ils se trouvent »a-t-il déclaré lors d’un échange avec un journaliste.

« Ils vivent en sursis », a affirmé, de son côté, Yoav Gallant, le ministre de la Défense. « La lutte est mondiale, a-t-il ajouté : « depuis les tireurs sur le terrain jusqu’à ceux qui profitent d’avions de luxe pendant que leurs émissaires agissent contre les femmes et les enfants, ils sont voués à la mort. »

La planification d’une campagne d’assassinats ciblés a été récemment confirmée au Wall Street Journal par des responsables israéliens. « Sous les ordres du Premier ministre Benyamin Netanyahou, les principales agences d’espionnage israéliennes travaillent sur des plans visant à traquer les dirigeants du Hamas vivant au Liban, en Turquie et au Qatar », ont-ils indiqué.

Des opérations différées

Des opérations qui seraient, pour le moment, différées afin de ne pas perturber les négociations visant à faire libérer les personnes retenues en otage par le Hamas. Le Qatar joue, en effet, un rôle central de médiateur dans ce processus.

La traque devrait donc commencer lorsque prendra fin la guerre dans la bande de Gaza, à en croire les responsables israéliens interrogés par le journal américain. Une opération qui aura pour objectif de faire payer les auteurs des crimes abominables du 7 octobre, mais aussi de prévenir de nouveaux massacres.

Ghazi Hamad, membre du Bureau politique du Hamas, dans une interview accordée le 24 octobre à la télévision libanaise, a été très clair quant aux intentions du mouvement terroriste : « Nous devons donner une leçon à Israël, a-t-il déclaré, et nous le ferons encore et encore. Le déluge d’Al-Aqsa [l’attaque du 7 octobre] n’est que la première fois, et il y en aura une deuxième, une troisième, une quatrième, parce que nous avons la détermination, la résolution, et les capacités de combattre. Devrons-nous payer un prix ? Oui, et nous sommes prêts à le payer. Nous sommes appelés une nation de martyrs, et nous sommes fiers de sacrifier des martyrs. »

« Lève-toi et tue le premier »

« Face à celui qui vient te tuer, lève-toi et tue le premier », énonce un verset du Talmud. Une citation dont s’est inspiré le journaliste Ronen Bergman pour le titre de son livre-enquête consacré à l’histoire de la politique d’assassinats ciblés menée par l’État d’Israël depuis sa création. Lors d’une conférence donnée en 2020 au musée d’Art et d’Histoire du judaïsme à Paris, l’auteur déclarait que l’on ne pouvait pas comprendre la vision sécuritaire d’Israël sans partir de la Shoah.

Les leçons retenues, après-guerre, par les fondateurs de l’État hébreu, expliquait-il, étaient qu’il y aurait toujours quelqu’un qui souhaiterait recommencer une autre Shoah. L’autre leçon était : « Les autres ne nous aideront pas. » Il fallait donc qu’il y ait un refuge. Et être prêt à le défendre à tout prix. Avec cela à l’esprit, et la conscience qu’à chaque décennie des adversaires se présentaient pour recommencer et éradiquer l’État d’Israël, on pouvait mieux comprendre cette dernière leçon qui disait : « Celui qui vient te tuer, lève-toi et tue-le le premier. »

Israël n’est bien entendu pas le seul État démocratique à pratiquer une politique d’assassinats ciblés. On se souvient du raid mené en 2011 par des commandos américains infiltrés au Pakistan pour liquider Oussama ben Laden. Dans Les Tueurs de la République, le journaliste Vincent Nouzille a raconté, de De Gaulle à Macron, les opérations conduites par la France pour régler ses comptes. Il n’en demeure pas moins qu’Israël détient, d’après les estimations de Ronen Bergman, un record avec plus de 2.700 opérations d’assassinats ciblés.

L’une des plus célèbres est l’opération Colère de Dieu qui a suivi la prise d’otages puis l’assassinat de onze athlètes israéliens par le commando palestinien Septembre noir, en 1972, lors des Jeux olympiques de Munich. Le Premier ministre de l’époque, Golda Meir, avait autorisé l’unité d’élite du Mossad « Kidon » (« baïonnette », en hébreu) à traquer tous les terroristes impliqués dans l’attaque non seulement dans des pays hostiles, comme le Liban ou la Syrie, mais aussi en Europe.

Cinquante ans plus tard, Israël est toujours confronté au terrorisme mais son message reste le même : où qu’il soit et quel que soit le temps nécessaire pour l’atteindre, celui qui verse le sang de ses concitoyens finira par en payer le prix.

Frédéric Martin-Lassez

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